Il y a plus de 30 ans aujourd’hui que j’ai rencontré celle qui est devenue officiellement ma femme grâce à la loi que vous avez portée.
Elle avait deux filles. Nous avons adopté deux autres enfants. Ils ont grandi. Certains se sont mariés, d’autre pas. Nous sommes aujourd’hui grands-mères de 6 petits enfants.
Nous nous sommes mariées l’an dernier pour fêter
notre amour de 30 ans.
Lors de notre mariage, nos enfants étaient nos témoins et nous ont fait des discours à pleurer. En exprimant combien cette cérémonie leur permettait de se sentir une vraie fratrie. Merci Christiane de nous avoir permis ces moments inoubliables. Vous pouvez être fière du bonheur que vous avez donné à tous les couples qui veulent se dire oui.
Vous pouvez être fière du sentiment d’égalité ressenti par tous ceux qui ont aujourd’hui le droit et le choix de dire non.
Cela fait bientôt 25 ans, un quart de siècle, que je me consacre à faire connaître les familles homoparentales. D’abord en tant que militante associative, puis en tant que sociologue, je me suis attelée à produire des connaissances sur ces familles et à initier un véritable champ de recherche sur l’homoparentalité.
Alors oui, la possibilité de se marier est un progrès immense pour l’égalité des droits. Mais il ne faut pas s’arrêter au milieu du chemin,
il faut continuer, notamment en ce qui concerne les familles homoparentales
- D’abord, il faut remarquer qu’à l’heure où un enfant sur deux nait hors mariage, les homos sont les seuls à devoir se marier pour être parents ensemble.
- 2 conséquences : La 1ere c’est que lorsqu’un couple s’est séparé avant d’avoir pu se marier, les liens de l’enfant avec le second parent ne peuvent être protégés.La deuxième, c’est le sentiment paradoxal que m’ont confié nombre de couples de femmes d’avoir à adopter leur propre enfant pour devenir mère aux yeux de la loi.
- Au Québec, lorsqu’un couple de femmes a eu recours à une procréation médicalement ou amicalement assistée, elles sont mères toutes les deux dès la naissance. Mais pour avoir une solution de ce type en France il faut déjà ouvrir la PMA à toutes les femmes et accepter que la filiation puisse reposer sur un engagement parental.
J’espère que nous aurons votre soutien pour l’étape suivante, l’ouverture de la PMA à toutes les femmes
cette étape ouvrira un débat qui risque d’être tout aussi violent que celui que nous avons vécu avec le mariage pour tous.
- Et puis, un dernier mot, il faut aussi penser à tous ces enfants qui ont deux papas dans le pays où ils sont nés et parce qu’ils sont nés du recours à une GPA n’en ont aucun en France ou alors qu’un seul.
Martine Gross, 13 avril 2016 lors de la projection débat du film « La sociologue et l’ourson » qui revient sur les débats sur le mariage pour tous en 2012 et 2013